SF Express : la Bourse s'emballe pour le "roi des colis"

En quelques jours, le discret patron d'un groupe de livraison de colis, SF Express, a grillé la politesse à plusieurs célèbres milliardaires pour s'imposer troisième fortune de Chine : conséquence du boom de l'e-commerce, mais surtout d'un précaire emballement boursier.
Il fuyait les projecteurs, mais à la faveur du succès fulgurant de la cotation de son entreprise SF Express à la Bourse de Shenzhen, Wang Wei a fait irruption fin février dans le trio de tête du classement Bloomberg des hommes les plus riches de Chine. Il s'y maintenait mi-mars avec 22 milliards d'euros d'actifs, dépassant Pony Ma (du géant internet Tencent), mais encore loin derrière Jack Ma, l'emblématique fondateur du colosse du commerce électronique Alibaba. Comme ce dernier, Wang Wei s'est forgé une réputation d'entrepreneur visionnaire avec le lancement de SF Express en 1993 à l'aide d'une poignée de salariés et d'une fourgonnette, anticipant le décollage des ventes en ligne.

Omniprésent

Fils d'un interprète de l'armée chinoise, Wang Wei a grandi à Hong Kong : c'est entre la colonie britannique et la Chine continentale qu'il a lancé ses livraisons transfrontalières - activité alors illégale, en raison du monopole de la Poste chinoise. Aujourd'hui, Wang Wei, 46 ans, évite obstinément les médias mais SF Express, parfois surnommé le "FedEx chinois", est omniprésent : son armée de quelque 80.000 livreurs, aux conditions de travail éprouvantes, arpente inlassablement les métropoles chinoises en triporteur pour acheminer colis et plis.
Impatient, SF Express a ignoré la liste d'attente d'environ 700 entreprises en quête d'un feu vert étatique pour intégrer les Bourses chinoises : en fusionnant, via une transaction complexe, avec une petite société de terres rares déjà cotée à Shenzhen, il a accaparé la place de celle-ci sur le marché. L'action SF Holding a ainsi remplacé le 24 février le titre Maanshan Dingtai : le cours a bondi de quelque 70 % en huit séances, faisant mécaniquement exploser la fortune de Wang Wei.
Pas surprenant selon Xu Yong, expert du cabinet CECSS spécialisé dans la logistique : "L'envolée reflète la confiance générale dans la situation et les perspectives" du groupe, après un bond de 112 % de ses bénéfices en 2016. L'environnement reste souriant : au moins 40 milliards de paquets express devraient être acheminés cette année en Chine, 9 milliards de plus qu'en 2016, générant des revenus de 500 milliards de yuans (67 milliards d'euros, + 25 % sur un an), prévoit l'Administration postale.

Son propre aéroport

Pour SF Express, cette cotation était cruciale "pour financer l'expansion de ses infrastructures, notamment dans les petites villes et le fret aérien", explique Xu Yong. Comptant déjà une flotte d'une trentaine d'avions, le groupe se fait construire une plateforme aéroportuaire dans le Hubei (centre).
Il n'est pas le seul à s'en remettre au marché: son grand rival ZTO Express s'est introduit en octobre en fanfare à Wall Street - tandis que YTO, STO Express et Yunda ont recouru au même stratagème pour se coter l'an dernier en Chine.
Malgré un potentiel colossal (les ventes sur l'internet chinois ont grimpé de 26 % en 2016), le secteur pourrait se consolider à deux ou trois acteurs seulement, estiment certains observateurs, à l'image du trio DHL-UPS-FedEx en Occident.
De quoi pousser les firmes à investir pour résister. Sans convaincre totalement : le titre de ZTO a fondu de 30 % depuis sa cotation à New York.
A contrario, SF Express, mieux positionné car moins dépendant des ventes sur internet que ses concurrents, provoque l'effervescence. Le groupe était valorisé jeudi 16 mars 34 milliards d'euros, après avoir atteint 42 milliards (soit la capitalisation de l'américain Yahoo !)... mais avec seulement 560 millions de bénéfice annuel.
De l'avis des courtiers, la fièvre a été exacerbée par une offre restreinte au vu de la demande : seules 3 % environ des parts de SF Holdings sont ouvertes aux échanges, tandis que Wang Wei en conserve 65 %. La frénésie a fini par inquiéter le gendarme de la Bourse, qui a placé le titre "sous surveillance", selon le magazine "Caixin", renforçant l'hypothèse d'une "bulle" aux lendemains incertains.

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