Argentine : refus de charger les grains

 

Toute la filière agricole argentine est bloquée par le coronavirus, les mesures prises pour empêcher sa propagation et les grèves des syndicats qui refusent que les ouvriers soient exposés. Les exportations de soja, de maïs et de céréales sont freinées ou à l'arrêt dans tous les ports du pays.

Le fleuve Parana est une des rares voies de circulation d'Argentine où les trafics ont été épargnés par des restrictions. Les navires océaniques parviennent sans encombre jusqu'à Grand Rosario, la première zone portuaire céréalière du pays, pour y charger les grains produits dans toute la moitié nord de l'Argentine, essentiellement maïs et soja. Les résultats l'an dernier ont dépassé toutes les attentes, avec des exportations qui se sont envolées de 50 % (cf. plus bas). Tous s'attendaient à une année 2020 aussi flamboyante quand, patatras, le coronavirus est venu enrayer la dynamique de la filière agricole.

La semaine dernière, ce sont les syndicats des ouvriers portuaires maritimes et fluviaux qui, les premiers, ont appelé à freiner le chargement des navires. Avec un message simple : « Nous n'effectuerons plus de chargement dans aucun port sur des bateaux qui n'auront pas d'abord respecté une quarantaine de 14 jours depuis leur dernière escale, que ce soit en naviguant ou au mouillage. » Cela s'est traduit par un ralentissement immédiat dans tous les ports. Les syndicats ont cependant très vite modifié leur communiqué en précisant que les navires transportant des produits médicaux, eux, seraient bien déchargés.

Conflits et restrictions en cascade

Le premier navire à en faire les frais arrivait du Brésil et devait embarquer 30 000 t de maïs destinés au Pérou. D’autres sont désormais en attente de chargement. La Chambre des producteurs d'huile et des exportateurs de céréales estime les pertes moyennes à 2 M$ par navire.

À ce problème sont venues se greffer les limitations imposées à la libre circulation des camions. Soumis au confinement, les villages et villes qu’ils sont censés traverser interdisent toute circulation de véhicules. Les poids-lourds ne peuvent plus acheminer les grains. Le nombre de leurs entrées dans la dizaine de terminaux céréaliers de Grand Rosario a baissé de 60 % en quelques jours.

Un autre conflit ajoute à la confusion : le syndicat des ouvriers des sites de stockage agricole, lui aussi, proteste contre les mesures d'exception prises à leur égard et qui les contraignent à travailler quand le reste de l'Argentine respecte scrupuleusement le confinement. Les photos des ouvrier portant des panneaux : « Je ne suis pas essentiel », « Je veux rester confiné », « Reste chez toi, moi je ne peux pas », « Ils nous obligent à travailler » ont fleuri sur les réseaux sociaux.

Enfin, un autre frein concerne cette fois les producteurs eux-mêmes dont les exploitations couvrent souvent des centaines voire des milliers d'hectares et auxquels les règles du confinement interdisent les déplacements d'engins de récolte et d'ouvriers entre leurs différents sites de production.

Les silos débordent

Dans un courrier adressé au ministre des Transports, les représentants portuaires et industriels soulèvent tout ce que « le bloquage des opérations sur les navires dans tous les ports du pays peut générer dans les prochains jours » et ce, alors que les récoltes de maïs et de soja démarrent : « une paralysie de la commercialisation des grains, des sous-produits et des biocombustibles, pour la consommation nationale comme pour l'exportation ».

Les syndicats ouvriers ont rappelé dans un autre courrier à la même adresse que 4 800 navires chargent des céréales dans les ports d'Argentine, soit 400 par mois. Ils considèrent que la mise en quarantaine de ces 400 bateaux aurait un impact dérisoire au regard de la crise sanitaire mondiale.

La récolte actuelle est en cours en attendant que des solutions soient trouvées pour dégager les stocks de grains et charger les bateaux. Les silos débordent.

Myriam Guillemaud-Silenko

 

Un record historique

L'Argentine a connu l'an dernier la plus belle récolte et le plus gros volume d'exportation de son histoire avec 60,25 Mt chargées sur des navires, soit deux fois plus que celui de 2018 – année certes de sécheresse – et de 25 % par rapport à 2016 et 2017, années « normales ». Selon la Bourse du commerce de Rosario, les deux tiers de ces volumes ont été opérés dans la dizaine de terminaux du Grand Rosario et portaient majoritairement sur du soja et du maïs. Pour l'orge et le tournesol, les exportations transitent par les ports plus au sud, Bahia Blanca et Necochea. Sans surprise, le soja a connu la plus forte progression (+ 178 %) avec 9,4 Mt, devant le maïs (+ 63 %) pour 34,8 Mt. Les ventes d’orge ont augmenté de 10 % pour s’établir à 3 Mt tandis que le blé est resté stable à 11 Mt. L'Argentine a aussi chargé 1,2 Mt de grain en provenance de Bolivie et du Paraguay (+15 %).

 

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