
© Airbus
"Nous sommes fortement enracinés en Europe mais nous avions besoin d'être plus visibles aux États-Unis. Il y a une vague de remplacements d'avions vieillissants aux États-Unis et nous avons le bon produit pour ça", a fait valoir Fabrice Brégier, PDG d'Airbus, à Mobile, pour annoncer la construction d'une usine d'assemblage de monocouloirs A320. "Cela fait de nous des citoyens américains. Ces trente dernières années nous avons vendu 17 % des avions du marché américain, cela veut dire que d'autres vendaient le reste", a renchéri John Leahy, directeur commercial d'Airbus. Cette usine "va nous donner un autre coup de pouce pour obtenir une plus grosse part des marchés à venir", à savoir "4.600 appareils qui doivent être fournis aux compagnies américaines dans les vingt prochaines années", a poursuivi M. Brégier.
"L'assemblage des avions devrait débuter en 2015"
La construction de la chaîne doit commencer à l'été 2013 dans cette ville côtière du golfe du Mexique. L'assemblage des avions devrait débuter en 2015, les premières livraisons en 2016. Airbus prévoit une production de 40 à 50 appareils par an d'ici 2018. Ce projet va générer "1.000 emplois stables et bien rémunérés" et au total 5.000 pour la région, ont fait valoir les dirigeants de l'avionneur européen. Airbus a déjà des chaînes d'assemblage à Toulouse, à Hambourg et Tianjin, en Chine. Boeing ne construit ses avions qu'aux États-Unis, à Seattle et depuis peu à Charleston, en Caroline du Sud.
Le constructeur européen a pris une longueur d'avance sur Boeing en décidant en décembre 2010 de remotoriser son best-seller A320 pour offrir aux clients des avions consommant 15 % de kérosène en moins que les modèles actuels. Les premiers A320 Neo doivent sortir en 2015, deux ans avant le modèle correspondant de Boeing, le 737 Max.
Boeing a tiré une violente bordée dès vendredi 29 juin, accusant son concurrent de "déplacer des emplois d'Europe vers les États-Unis", et affirmant que les aides "illégales" qu'Airbus a reçues des gouvernements européens ont détruit des "milliers d'emplois américains". L'Organisation mondiale du commerce (OMC) a jugé que Boeing comme Airbus avaient bénéficié d'aides gouvernementales excessives, dans des décisions que chacune des parties interprète à son avantage. Boeing agite le spectre de rétorsions commerciales des États-Unis envers l'Europe, tandis qu'Airbus affirme que le conflit ne sera résolu que par la concertation.
Thomas Enders, le patron d'EADS, maison mère d'Airbus, a été catégorique : "Il n'y aura absolument aucune suppression de postes", a-t-il déclaré.
Éviter les risques de change
Airbus cherche à réduire ses coûts en assemblant des appareils aux États-Unis. Il évitera ainsi le risque de change : les avions se vendent sur le marché mondial en dollars, alors qu'il produit essentiellement en Europe. Fabrice Brégier a admis qu'Airbus comptait produire aux États-Unis dans "un environnement très compétitif, avec un contenu dollar, même si les lignes d'assemblage européennes sont très compétitives". L'assemblage d'un avion ne représente que 5 % de sa valeur, le reste représente des commandes pour les fournisseurs et les sous-traitants qui montent les différentes sections l'appareil. M. Brégier a remarqué que son groupe tentait par ailleurs d'obtenir un maximum de contrats de sous-traitance en dollars pour bénéficier de la faiblesse relative du billet vert par rapport à l'euro.
Les dirigeants du constructeur européen comptent aussi mettre en avant leur nouvelle "citoyenneté" américaine pour briguer plus de contrats militaires auprès du Pentagone. "Cela ne peut pas faire de mal", a ironisé l'un des dirigeants du groupe. Outre les 600 millions investis par Airbus dans cette unité, les aides de l’État de l'Alabama dépassent 100 millions de dollars, ont fait valoir les dirigeants du groupe. Autre bénéfice pour Airbus, l'Alabama est un des États où l'affiliation à un syndicat n'est pas obligatoire.