Au Havre, Christian de Tinguy prend sa retraite

Après quarante ans dans le monde du transport et du portuaire, Christian de Tinguy quitte la manutention havraise et l’Unim. Le départ d’un battant.
Le 24 juin, toute la communauté portuaire havraise l’a chaleureusement applaudi. "Un homme de défis prend la retraite de ses activités, a lancé Hervé Bonis, président de l’Umep, qui tenait son assemblée générale. Nous mesurons à quel point Christian de Tinguy a marqué son temps, par sa constance et ses valeurs." Et de le remercier pour son "engagement passionné au service de la manutention portuaire, de l’Umep, mais aussi de toutes les entreprises privées".

Fort de ce panégyrique, Christian de Tinguy, 65 ans, est retourné dans son bureau de Terminaux de Normandie : le retraité classe ses archives, histoire de tourner la page de trente ans à la direction de la société et de neuf ans à la présidence de l'Union nationale des industries de la manutention (Unim).

C’est un service militaire dans la Marine qui fait naître le goût de la mer à l'officier chef de quart d’un escorteur, "Le Vendéen", à 22 ans. Puis l’ingénieur des mines également formé à la gestion à HEC le retrouve chez Pechiney Aluminium, au service des Transports, à gérer les affrètements maritimes dans le monde entier des matières premières comme la bauxite, en lien avec les ports de Marseille et Fos.

De la réforme des dockers à celle des GPM

Christian de Tinguy passe ensuite "de l’autre côté de la barrière" en rejoignant la Société anonyme de gérance et d’armement (Saga), alors dans le groupe Suez. En 1991, il arrive au Havre, à la tête de la Société de manutention de la Basse-Seine (Somaba), filiale portuaire de Saga qui avait investi dans le Terminal de Normandie en partenariat avec l’entreprise familiale Perrigault. Les deux ont créé, en 1992, Terminaux de Normandie (TN).

Le directeur général de TN sera de toutes les réformes. Celle de juin 1992, d’abord, "très courageuse", avec la loi du secrétaire d’État à la Mer Jean-Yves Le Drian qui change le statut des dockers alors intermittents.

"C’était l’apocalypse pour les dockers qui se demandaient ce qui leur arrivait, mais ce fut très rapide, les accords de place ont été signés en novembre 1992 et la mensualisation de 1.000 des 2.300 dockers mise en place dès 1993, se souvient Christian de Tinguy. Il y avait une volonté politique, une volonté de la place et de la profession ainsi qu’un dialogue social relativement bon et des accords équilibrés. Ce qui a été construit n’a jamais été remis en cause". Reste que le plan social a coûté 1,3 milliard de francs, soit 200 millions d’euros, dont plus de la moitié à la charge des entreprises, "ce qui a ralenti les investissements durant des années".

Des combats inachevés

Mais il y a toujours eu des combats mener pour le président du Groupement des employeurs de main-d’œuvre (Gemo) du Havre puis de l’Unim. "La réforme des ports a été inachevée, déplore le nouveau retraité. Le régime de travail des dockers a été changé mais pas la domanialité portuaire, ce qui était pourtant prévu". La conduite et l’entretien de l’outillage privé avaient aussi été confiés au port, en échange de sa contribution au plan social. Et depuis la lente réforme de 2008, "la situation a empiré", critique-t-il, "inquiet", avec notamment "l'exclusion de la gouvernance des investisseurs privés". Dans un environnement concurrentiel, "les relations avec les autorités sont devenues des rapports de force", déplore Christian de Tinguy.

Il dénonce aussi les "erreurs" comme le terminal multimodal du Havre qui a coûté 150 millions, d’euros dont 110 millions de financements publics, comme le retard de la chatière, l'accès fluvial direct à Port 2000 : "Nous devons travailler tous ensemble et le privé participer aux instances décisionnelles !". Il ne cesse de le répéter : "Les ports sont d’abord des outils de souveraineté, un service public stratégique pour le commerce extérieur de la France. S’ils ne se réforment pas de façon cohérente, cela va mal se terminer".

Christian de Tinguy vient de passer le flambeau à François Guérin pour Terminaux de Normandie et à Louis Jonquière, le 3 juin, pour l’Unim, avec les dossiers en cours : convention de terminal, présence du secteur privé dans la gouvernance, création d’une direction générale des ports, une tutelle unique qui aurait autorité sur les directeurs des ports... Il termine ses cartons mais reste libre, entre Le Havre et sa Vendée familiale, pour partager son expertise, si besoin était.

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