En attendant le Brexit chez Bolloré à Roissy

Dans la plateforme logistique du groupe Bolloré à Roissy, où des morceaux d'avions côtoient parfums, livres et énormes bobines de fibre optique, les échanges commerciaux internationaux donnent le rythme, et les péripéties européennes en attendant le Brexit sont scrutées avec attention.
"Cela va être une nuisance pour la logistique de la plupart de nos clients mais clairement, ça va aussi valoriser notre expertise", indique Henri Le Gouis, directeur général de Bolloré Logistics Europe, dans les bureaux au pied des pistes de l'aéroport Charles-de-Gaulle. Au rez-de-chaussée, des déclarants de douane reçoivent, remplissent et valident des bordereaux, aujourd'hui principalement numériques, pour faire transiter des marchandises venues des quatre flèches cardinales.
Bolloré réalise désormais la majorité de son activité dans la communication et les médias, après la consolidation de Vivendi. Mais la logistique, avec 6 milliards d'euros en 2018 (+ 6 % sur un an), représente plus du quart de son chiffre d'affaires. L'entreprise emploie 300 déclarants en France. Un nombre insuffisant pour absorber l'accroissement brutal de démarches douanières qui aura lieu si le Royaume-Uni quitte l'Union européenne dans les semaines ou les mois qui viennent.
"Nous avons lancé une cession de formation d'une trentaine de personnes pour nous renforcer dans cette compétence, et nous avons mis en place une procédure opérationnelle pour limiter le temps d'attente des camions aux frontières", explique Henri Le Gouis. Les 30 nouveaux ne seront toutefois opérationnels que dans un an. Ni l'administration des douanes ni les entreprises de logistique ne peuvent réellement se préparer à la rupture annoncée, étant donné l'incertitude qui règne autour de la date et des modalités.
"On peut penser qu'il risque d'y avoir une vague de chaud", admet le directeur général. "À ce stade, on ne voit pas comment on arriverait à entrer dans le Brexit sans vraie panique, ou du moins sans vraies difficultés au niveau de la chaîne logistique". Henri Le Gouis assure qu'il ne se frotte pas les mains à l'idée que le Brexit puisse apporter des opportunités à la filiale du groupe Bolloré, mais il reconnaît que cela valoriserait l'activité de douane, et que les entrepôts dans les ports bordant la Manche seraient sollicités de façon accrue. "Au-delà du Brexit, il y a un phénomène de mesures restrictives qui affectent le commerce mondial et qui va nécessiter des déclarants en douane de plus en plus pointus", constate-t-il. "On sent bien que petit à petit on tourne un peu le dos au libre-échange".

30.000 m2 au pied des pistes

Les 30.000 m2 de la plateforme au pied des pistes de l'aéroport Charles-de-Gaulle ont déjà répondu à la croissance des besoins en fret aérien ces dernières années. Inauguré en 2016 pour remplacer l'ancien entrepôt par un bâtiment moderne et plus sécurisé, le "hub" de Roissy a ingurgité 44 % de volumes supplémentaires en trois ans. Il a été construit en fonction des besoins des exportateurs français, dans des secteurs comme le luxe, l'aéronautique, les cosmétiques ou encore les équipements de haute technologie. Dans les cellules "pharmacie", où la température peut descendre jusqu'à - 25 °C, des médicaments à destination de l'Indonésie côtoient des cartons estampillés "banque de tissus humains", non loin des coffres-forts où sont stockés les psychotropes et stupéfiants.
Les entrepôts vivent au rythme des exports, qui décollent du jeudi au samedi, et des imports, qui se concentrent du vendredi au lundi. Le tout dans un calme relatif et étonnant dans ce décor de magasin de meubles : les chariots fonctionnent avec des batteries électriques, et on entend surtout crisser le plastique et le ruban adhésif au moment de l'emballage des cargaisons. Deux cent personnes, la plupart en CDI, s'affairent dans la plateforme avec beaucoup d'aides mécaniques. Mais pas de robots en vue : "il y a beaucoup de diversité dans les marchandises qu'on doit traiter, ça limite l'automatisation", constate Pascal Le Guevel, le directeur du site.
Fin 2018 et début 2019, les équipes ont senti un tassement dans la croissance du fret, à la suite des tensions commerciales qui ont affecté la Chine. "Le marché chinois du luxe a explosé ces dernières années, la demande a été très forte. Mais ces derniers mois, il y a eu un ralentissement, particulièrement marqué dans l'automobile", souligne Henri Le Gouis. Mais il ne s'inquiète pas, d'autant que le boom du commerce en ligne "va accroître les volumes de fret aérien pendant les années à venir. Et nous sommes dans une démarche exploratoire avec Alibaba (le géant chinois, NDLR) pour voir comment traiter ces flux quand ils arriveront en Europe", rassure-t-il.

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