
Anne-Laure Noat, consultante associée d'Eurogroup Consulting
Temps fort des Journées européennes du fret ferroviaire, le baromètre sur la perception du rail par les chargeurs a livré ses résultats le 27 mars lors du SITL. Réalisé par Eurogroup avec l'AUTF, l'ILEC et ECR France, le panel sondé se compose à 73 % d'industriels et à 27 % de distributeurs ; les deux tiers transportant des produits de grande distribution et la majorité déclarant un chiffre d'affaires supérieur à 500 millions d'euros. Ce décor planté par Anne-Laure Noat, consultante du cabinet d'études, l'ouverture à la concurrence et la multiplication des acteurs, voulues et saluées par les chargeurs, se sont traduites en revanche par "un manque de lisibilité de l'offre. Déficit de communication sur la gestion des sillons, absence d'offre packagée et d'incitations, qualité de service perfectible, fragmentation du marché" sont les principaux griefs soulevés. Si les initiatives privées sont encouragées, "le regroupement des acteurs adossé à une cartographie de leurs services sur le réseau" est recommandé pour clarifier l'offre.
"Adapter le fer à la segmentation des envois de la grande distribution"
Cette piste imposerait selon les chargeurs "des accords entre les opérateurs et la diminution d'échelons de décisions". Elle aurait pour avantage "d'améliorer la transparence de la filière en termes d'organisation, de responsabilités des acteurs, de coût et d'indicateurs de qualité". Selon le baromètre, l'application de ces principes favoriserait le transfert modal avant la congestion routière... et la mise en œuvre de l'écotaxe poids lourds dont l'exonération des pré et post-acheminements à un transport combiné est un exemple d'incitation citée.
L'approche multimodale privilégiée
Avant le transport ferroviaire conventionnel, le combiné rail-route suscite une véritable attente de la part des donneurs d'ordres. Ce constat se vérifie à travers la demande en faveur du maintien d'une offre "wagon isolé", organisée ou non en lots, à partir de points de massification. Pour le panel sondé, ce type de prestation "correspond à l'enjeu de la grande distribution d'augmenter la fréquence de livraison, et aux volumes actuels de plus en plus fragmentés". À ces conditions, 80 % se déclarent prêts à confier davantage de fret au rail dans des proportions de l'ordre de 12 %. "Respect de l'environnement, sécurité et intégrité des marchandises" sont d'autres motivations avancées. "Ces éléments laissent penser que le fret ferroviaire a un avenir, pas forcément dans sa forme conventionnelle mais davantage dans sa forme combinée avec un autre mode de transport. Il s'agit alors d'envisager le fret ferroviaire comme une composante d'un flux dans une offre multimodale et non comme un mode exclusif", conclut Anne-Laure Noat. Reste un défi de taille : convaincre les directions des entreprises industrielles et de distribution de modifier leurs plans de transport en faveur du rail (ou de la voie d'eau) sachant que 91 % d'entre elles se déclarent aujourd'hui satisfaites par l'offre routière.