Les sept projets stratégiques ont été adoptés au printemps 2009. Chaque port avait alors deux ans pour mettre en place définitivement la réforme. Entre-temps, un accord-cadre avait été signé le 30 octobre 2008 par les syndicats, l’Unim (fédération patronale des sociétés de manutention) et l’Union des ports français (UPF), jetant les bases des conditions de détachement des agents portuaires (grutiers, portiqueurs et agents de maintenance).
Selon les particularités locales, la gestion de chaque activité devait être transférée soit à un opérateur entièrement privé, soit à une société comprenant une participation minoritaire du port, soit à une filiale de l’établissement public dans le cas des activités reconnues d’intérêt national. C’est ce qui s’est produit à Marseille-Fos pour l’activité hydrocarbures (la moitié des 50 Mt de vracs liquides traités chaque année par le port est du brut transformé sur place, ce qui constitue un tiers du raffinage français). Pour la cession de leurs terminaux, les ports avaient obligation de négocier avec les opérateurs déjà présents et de recourir à un appel à projets en cas d’absence d’accord.
Dans certains cas, des sociétés communes ont été créées par les manutentionnaires, notamment pour mutualiser les moyens dans la maintenance ou la gestion du personnel. Une commission nationale d’évaluation des cessions d’outillages portuaires a accompagné les ports pour conclure les conventions liées à la vente du matériel.
Côté social, les entreprises de manutentions, les ports, l’État et les représentants des salariés de la manutention menaient des discussions sur leur futur statut et les conditions de leur détachement au privé : des négociations émaillées de nombreuses grèves dans les ports du pays et de plus en plus à mesure qu’on approchait de l’échéance, et pour cause. L’accord-cadre d’octobre 2008 validait le principe du détachement des agents portuaires, reconnaissait le principe de la pénibilité de leurs métiers et les autorisait à plancher sur une convention collective commune avec les dockers.
Or, après deux ans de travail sur ce projet, et alors que les parties prenantes étaient sur le point d’aboutir à un accord définitif, la réforme du régime général des retraites s’est invitée aux débats, remettant en cause une partie des engagements de l’État.
Réforme ultramarine
L’année suivante, quatre ports ultramarins ont à leur tour accédé au statut de Grands Ports maritimes. La loi portant réforme des ports d’Outre-Mer relevant de l’État a été définitivement adoptée le 13 février 2012. Les trois ports d’intérêt national jusque-là concédés aux Chambres de commerce et d’industrie – Fort-de-France (Martinique), Dégrad-des-Cannes (Guyane) et Port-Réunion (La Réunion) – ainsi que le Port autonome de la Guadeloupe (Pointe-à-Pitre) sont devenus des établissements publics de l’État à personnalité morale propre, chargés de l’ensemble des missions d’aménagement, de gestion, d’exploitation et de promotion. Comme les sept GPM de l’Hexagone, ils sont dotés d’une gouvernance comprenant un Conseil de surveillance, un Directoire et un Conseil de développement, mais leur fonctionnement est adapté aux spécificités ultramarines.
Différence majeure avec la métropole, les Grands Ports maritimes d’Outre-Mer ont conservé dans un premier temps la maîtrise de leurs activités de manutention et décideront eux-mêmes d’une éventuelle cession des outillages à des entreprises privées et du détachement des personnels. De plus, la loi du 22 février 2012 intègre le souci d’une meilleure maîtrise des coûts de passage portuaire, qui influent fortement sur le coût de la vie en Outre-Mer. Cinq décrets du 1er octobre 2012 ont institué, à la date du 1er janvier 2013, les quatre Grands Ports maritimes de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion. Ces ports se sont dotés de leur nouvelle gouvernance au printemps 2013.

Les Ports autonomes ont d'abord changé de nom pour devenir des Grands Ports maritimes (GPM) en même temps que leur gouvernance évoluait d'un Conseil d'administration avec président vers une organisation à trois instances. Ils sont donc dotés d'un Directoire composé de trois membres, dont le président (ou directeur général du port) est nommé par décret ministériel. Le Directoire est placé sous le contrôle d'un Conseil de surveillance composé de dix-sept membres, dont des représentants de l’État, des collectivités territoriales, des salariés du port et des membres choisis au titre de personnalités qualifiées. Il peut s'agir de représentants des chambres de commerce et d'industrie locales, de responsables d'entreprises utilisatrices du port, etc.
Enfin, un Conseil de développement de vingt membres, regroupant les acteurs locaux (économiques, sociaux ou scientifiques) concernés par le fonctionnement du port, tient un rôle consultatif sur les grandes décisions.