L'image des registres internationaux ternie par les pavillons de complaisance


Dans la longue liste des registres internationaux, certains demeurent encore fiables mais la mauvaise image de marque des pavillons de complaisance rejaillit sur l'ensemble.


"Les registres libres représentent 56 % de la flotte mondiale"

© V. J. C.
© V. J. C.
Selon la note de synthèse de l'Isemar, les États fixent librement les conditions d'attribution de leur pavillon. Ceci permet à certains d'entre eux de mener une "politique minimaliste" afin d'attirer des armements en quête de réduction de coûts en matière de prélèvements obligatoires (impôts, charges salariales et sociales), de frais d'entretien et de sécurité des navires et parfois même de discrétion.
Camille Valero, auteur du document, accuse les registres "très négligents" de "mettre en péril la sécurité maritime, l'environnement et la protection sociale des gens de mer".
Actuellement, en termes de tonnes de port en lourd (tpl), les registres libres représentent 56 % de la flotte mondiale. Une proportion quasi-identique à celle du début des années 2000 (chiffrée à 55 %). La croissance de la flotte mondiale et celle sous registre libre ont évolué de la même manière. Elles ont plus que doublé en dix-sept ans.
L'Isemar note que "les registres de Singapour et de Hong Kong ont capté une partie de la croissance des armements asiatiques". La part des registres européens traditionnels a, de son côté, régressé depuis 2000, nonobstant leurs stratégies de maintien d’attractivité de leur pavillon.
Pour l'Institut, l'ensemble des registres de libre immatriculation n’est toutefois pas homogène. Ceux qui figurent en tête de liste (à savoir le Panama, le Liberia, Malte, Chypre et Bahamas) sont considérés dans leur ensemble comme fiables. "La qualité du registre (fiscale, sociale, réglementaire) constitue un argument commercial dans le cadre d’une stratégie d’apport économique", souligne Camille Valero, ajoutant que l’État du registre est conscient de ce qu’il fait et a le choix de son niveau d’exigence.
"Un certain nombre de registres de libre immatriculation de moindre importance et quelques États déficients acceptent d'enregistrer des navires parfois sous-normes et exercent peu ou pas du tout leur rôle régalien de contrôle", ajoute l'auteur de la note. Un certain nombre d'opérateurs pratiquent généralement un "turnover" entre ces registres déficients.

Une gestion parfois confiée à des sociétés privées

Le document souligne que les événements de mer et autres accidents maritimes restent fréquents parmi ces registres. "Derrière ces pavillons de libre immatriculation, on trouve parfois des sociétés privées à qui l'État a délégué une partie de ses compétences d'administration maritime", explique Camille Valero.
Entre 1948 et 1998, la société américaine International Registries Inc. (IRI) a géré aux États-Unis le registre libérien. Suite à un conflit avec Monrovia, elle a perdu le contrat mais gère toujours le registre des Îles Marshall créé en 1992. Pour l'Isemar, Liberian International Ship & Corporate Register s'occupe encore de ce type de sociétés gérant des "petits pavillons". De même, une entreprise des Émirats arabes unis en gère une pour la Tanzanie, une société du Liban pour le Togo, une firme américaine pour le Vanuatu et une entreprise de Singapour encore pour la Mongolie.
"Cette logique de privatisation s'inscrit à la fois dans un cadre de prérogative publique et de logique commerciale", affirme l'Isemar, ajoutant que lorsqu'il n’existe pas d’administration maritime étatique, une société commerciale gère le registre.

Des pavillons classés en liste noire bannis des ports signataires

Dans les années 1980, les accidents maritimes et la difficulté de lutter contre les déficiences des navires ont fortement incité les États côtiers à réagir. Cela s’est traduit par la mise en place d’accords régionaux de contrôle au travers des Memorandum of Understanding (MoU) de Paris (1982) et de Tokyo (1993) et des exigences propres aux États-Unis. La note de synthèse rappelle que les navires étrangers sont désormais contrôlés de manière coordonnée dans les ports (Port State Control) et doivent être placés en conformité aux conventions internationales (OMI, OIT). Les MoU tiennent dès lors un classement public des pavillons selon le taux de conformité et le nombre de détention, avec une liste blanche, une liste grise intermédiaire et la liste noire où de nombreuses déficiences sont constatées.
Des pavillons classés en liste noire peuvent être bannis des ports des pays signataires, indique l'Isemar. Les armateurs, mais aussi les acteurs liés (tels que les affréteurs, banques ou assurances) connaissent les risques liés au classement des pavillons. Qu’ils soient gérés par des administrations maritimes ou des sociétés privées, les principaux registres sont soucieux de leur classement dans la liste blanche comme un argument commercial. Les registres libres peuvent choisir de privilégier les navires récents, les plus anciens se retrouvent sur des registres de seconde zone et évitent de fréquenter les régions à fortes contraintes réglementaires.

"Les registres libres représentent 56 % de la flotte mondiale"


Actuellement, en termes de tonnes de port en lourd (tpl), les registres libres représentent 56 % de la flotte mondiale. Une proportion quasi-identique à celle du début des années 2000 (chiffrée à 55 %). La croissance de la flotte mondiale et celle sous registre de libre immatriculation ont évolué de la même manière. Elles ont plus que doublé en dix-sept ans.
L'Isemar note que "les registres de Singapour et de Hong Kong ont capté une partie de la croissance des armements asiatiques". La part des registres européens traditionnels a, de son côté, régressé depuis 2000, nonobstant leurs stratégies de maintien d’attractivité de leur pavillon.
Pour l'Institut, l'ensemble des registres de libre immatriculation n’est toutefois pas homogène. Ceux qui figurent en tête de liste (à savoir le Panama, le Liberia, Malte, Chypre et Bahamas) sont considérés dans leur ensemble comme fiables. "La qualité du registre (fiscale, sociale, réglementaire) constitue un argument commercial dans le cadre d’une stratégie d’apport économique", souligne Camille Valero, ajoutant que l’État du registre est conscient de ce qu’il fait et a le choix de son niveau d’exigence.
"Un certain nombre de registres de libre immatriculation de moindre importance et quelques États déficients acceptent d'enregistrer des navires parfois sous-normes et exercent peu ou pas du tout leur rôle régalien de contrôle", ajoute l'auteur de la note. Un certain nombre d'opérateurs pratiquent généralement un "turnover" entre ces registres déficients.

Une gestion parfois confiée à des sociétés privées

Le document souligne que les événements de mer et autres accidents maritimes restent fréquents parmi ces registres. "Derrière ces pavillons de libre immatriculation, on trouve parfois des sociétés privées à qui l'État a délégué une partie de ses compétences d'administration maritime", explique Camille Valero.
Entre 1948 et 1998, la société américaine International Registries Inc. (IRI) a géré aux États-Unis le registre libérien. Suite à un conflit avec Monrovia, elle a perdu le contrat mais gère toujours le registre des Îles Marshall créé en 1992. Pour l'Isemar, Liberian International Ship & Corporate Register s'occupe encore de ce type de sociétés gérant des "petits pavillons". De même, une entreprise des Émirats arabes unis en gère une pour la Tanzanie, une société du Liban pour le Togo, une firme américaine pour le Vanuatu et une entreprise de Singapour encore pour la Mongolie.
"Cette logique de privatisation s'inscrit à la fois dans un cadre de prérogative publique et de logique commerciale", affirme l'Isemar, ajoutant que lorsqu'il n’existe pas d’administration maritime étatique, une société commerciale gère le registre.

Des pavillons classés en liste noire bannis des ports signataires

Dans les années 1980, les accidents maritimes et la difficulté de lutter contre les déficiences des navires ont fortement incité les États côtiers à réagir. Cela s’est traduit par la mise en place d’accords régionaux de contrôle au travers des Memorandum of Understanding (MoU) de Paris (1982) et de Tokyo (1993) et des exigences propres aux États-Unis. La note de synthèse rappelle que les navires étrangers sont désormais contrôlés de manière coordonnée dans les ports (Port State Control) et doivent être placés en conformité aux conventions internationales (OMI, OIT). Les MoU tiennent dès lors un classement public des pavillons selon le taux de conformité et le nombre de détention, avec une liste blanche, une liste grise intermédiaire et la liste noire où de nombreuses déficiences sont constatées.
Des pavillons classés en liste noire peuvent être bannis des ports des pays signataires, indique l'Isemar. Les armateurs, mais aussi les acteurs liés (tels que les affréteurs, banques ou assurances) connaissent les risques liés au classement des pavillons. Qu’ils soient gérés par des administrations maritimes ou des sociétés privées, les principaux registres sont soucieux de leur classement dans la liste blanche comme un argument commercial.
Les registres de libre immatriculation peuvent choisir de privilégier les navires récents, les plus anciens se retrouvent sur des registres de seconde zone et évitent de fréquenter les régions à fortes contraintes réglementaires.

Vincent Calabrèse

Jeudi 21 Mars 2019



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