La France peut-elle interdire les vols domestiques ?

Le 22 juin, le secrétaire d'État français aux Transports Jean-Baptiste Djebbari a annoncé que la suppression de lignes aériennes intérieures en France, là où existe une alternative en train en moins de 2h30, s'appliquera à toutes les compagnies et pas seulement à Air France.
Le lendemain, la Commission européenne a confirmé être en discussion avec les autorités françaises pour évaluer si cette décision était compatible avec la législation de l'UE.
Le Syndicat des compagnies aériennes autonomes (Scara), qui regroupe plus de 50 % des compagnies aériennes françaises et des sociétés d'assistance aéroportuaire et de formation, a déjà son avis sur la question. Très remontée depuis l'annonce des aides accordées à Air France, la fédération professionnelle estime que, "cette décision pose trois problèmes majeurs". Pour le Scara, "elle pourrait porter atteinte à la liberté d'entreprendre qui a valeur constitutionnelle, elle n'est étayée par aucune donnée scientifique concernant l'impact environnemental de l'avion qui serait moindre que celui du train et elle sera vraisemblablement rejetée au niveau européen".
Un porte-parole de la Commission européenne, Stefan de Keersmaecker, a rappelé que dans le cadre du Pacte vert européen, au cœur de la politique de la Commission von der Leyen, il est demandé au secteur du transport de réduire considérablement ses émissions pour contribuer aux objectifs de l'UE en matière de neutralité climatique et qu'il existe "un règlement permettant aux États membres de limiter, voire d'interdire des vols en cas de sérieux problèmes environnementaux, et en particulier lorsqu'il y a (...) des alternatives ". Mais que les mesures "doivent être non discriminatoires et proportionnées à l'objectif poursuivi" et qu'elles "ne peuvent pas fausser la concurrence entre les transporteurs aériens et ne peuvent pas excéder trois ans".
"Comment peut-on démontrer, en l'espèce, qu'il y a un problème grave d'environnement ?", demande le Scara, qui annonce que "si la Commission européenne ou un autre État membre s'y oppose la mesure ne pourra pas entrer en vigueur. L'Espagne avec Vueling et Volotea, ou l'Irlande avec Ryanair, accepteraient-ils la décision d'interdire un marché ?".

Débat sur l'impact écologique

Le syndicat patronal fait remarquer que "le train dessert les centres-villes, alors que l'avion dessert des périphéries et le choix de la clientèle peut s'orienter différemment en fonction des destinations".
Pour ce qui est du développement durable, il affirme que "scientifiquement, le train n'a pas significativement moins d'impact environnemental que l'avion". Il se réfère à un rapport de la cour des comptes de 2014 sur la grande vitesse ferroviaire qui évoquait "un bilan environnemental en demi-teinte" et affirmait que "l'impact de la construction des LGV sur les milieux naturels, quoiqu'inférieur, ne diffère pas fondamentalement de celui des autoroutes".
Ce rapport liait le bilan environnemental jugé décevant par rapport à la route et au transport par autocar aux faibles taux de remplissage de certaines liaisons, notamment celles empruntant le réseau classique moins rapide et celles comportant de nombreux arrêts dans des villes de taille modeste. Il évaluait notamment que l'impact écologique de la construction d'une ligne à grande vitesse nécessitait 12 ans d'exploitation avant qu'elle atteigne la neutralité carbone.
Le Scara fustige aussi "les idées fausses sur l'impact environnemental de l'avion relayées par des campagnes de dénigrement (flygskam), comme le démontre le rapport de la Chaire Pégase". Cette chaire rattachée à Montpellier Business School et dédiée à l'économie et au management du transport aérien et de l'aérospatial a publié ce rapport à décharge en février dernier. L'association juge "bon de rappeler également que l'électricité qui alimente le TGV est produite par des centrales nucléaires ou par des centrales à charbon ou à pétrole qui ne sont pas des modes de production très vertueux".
 "Cette décision de supprimer les dessertes aériennes intérieures ne serait-elle qu'une justification fallacieuse de l'aide de 7 milliards d'euros accordée à Air France?", lance le Scara.

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