
© RFF/Capa/Stéphanie Jayet (Toma)
La SNCF est prête à alléger la dette de RFF pour reprendre une main sur lui. "Nous disposons des moyens, dans des conditions à définir, de reprendre à notre compte une partie de la dette historique (portée par RFF)", a déclaré Sophie Boissard, directrice générale déléguée chargée de la stratégie et du développement de la SNCF à Berlin. Bras droit du président Guillaume Pepy, la dirigeante ne s'est pas épanchée sur les modalités d'une telle opération mais celle-ci pourrait "se traduire par une participation au capital (de RFF)". Elle a d'emblée posé une contrepartie majeure. "Dès lors que nous sommes les premiers financeurs et utilisateurs du réseau, nous voulons avoir voix au chapitre", a résumé Mme Boissard.
"Nous voulons avoir voix au chapitre"
Une loi de 1997 a séparé l'exploitation des trains, assurée par la SNCF et quelques opérateurs privés, de la gestion du réseau, attribuée à RFF. Mais la SNCF gère toujours pour le compte de RFF le personnel de la Direction de la circulation ferroviaire (DCF), qui conçoit les horaires et régule le trafic, et SNCF Infra (maintenance et entretien des voies). Elle acquitte également à RFF des péages pour l'utilisation des voies et la partie ferroviaire des gares. Ce schéma ne donne satisfaction à aucune des deux entreprises, dont la dette commune n'a cessé de croître en quinze ans et dépasse aujourd'hui 32 milliards d'euros, imputable pour 29,6 milliards à RFF. Le gouvernement a annoncé pour 2013 une loi réformant à la fois la gouvernance du système ferroviaire et le statut social des cheminots.
L'équation financière
"Le plus inquiétant, c'est vraiment l'équation financière", a insisté Sophie Boissard qui, en s'appuyant sur les travaux des Assises du ferroviaire fin 2011, prévoit une dette commune avoisinant 60 milliards d'ici dix ans. Pour stopper l'hémorragie, la SNCF préconise des "efforts conjugués" de l'entreprise, des régions "et de la collectivité nationale" pour participer à l'effort de renflouement dans le cadre d'un "pacte national pour le rail". Selon Mme Boissard, "une hausse modérée mais régulière" de la contribution des Régions, qui financent les TER, "pourrait permettre de réinjecter quelques milliards dans le système". La collectivité nationale, autrement dit l’État, pourrait aussi prendre sa part "par le biais d'une reprise partielle de la dette ou d'une contribution extraordinaire pendant un laps de temps", avance-t-elle.
Ce triptyque devra, selon la SNCF, être associé à "la constitution d'un groupe ferroviaire unifié". En clair, il s'agit de réunir rails et trains sous la houlette de la SNCF. Une thèse maintes fois défendue par la président du groupe, Guillaume Pepy. En tant qu'opérateur principal du réseau, la SNCF "exerce des missions communes à tous les acteurs", a souligné le directeur de SNCF Infra, Pierre Izard. Selon lui, l'intégration est notamment utile dans "la gestion des crises, le pilotage de la sûreté sur le réseau ou encore la sécurité ferroviaire". Le dispositif préconisé par la SNCF risque toutefois de se heurter de plein fouet à la volonté de la Commission européenne, dont les prochaines propositions pour le ferroviaire, attendues fin 2012, pourraient aller vers une plus grande séparation entre gestion de l'infrastructure et activité de transport. Outre RFF, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf), la Cour des comptes, l'Inspection générale des finances (IGF), les nouveaux opérateurs ferroviaires et les associations d'usagers se sont prononcés dans ce sens.