Le bois illégal encore trop présent en France

Arbres protégés coupés dans les forêts tropicales pour fabriquer meubles ou parquets : les importations de bois illégal persistent en France, même si elles régressent sous la pression des organisations écologistes et sous l'effet des changements dans l'industrie du bois.
La loi d'avenir sur l'Agriculture, adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale mardi 14 janvier, vise à mettre en œuvre le règlement européen de mars 2013 contre les importations illégales de bois. Mais "pour l'instant, en pratique, la France a une politique de porte ouverte au bois illégal", estime Alexandra Pardal, directrice de campagne Forêts chez Global Witness.

Haut risque d'illégalité

L'ONG classe la France au troisième rang des importateurs européens de bois "à haut risque d'illégalité", même si la proportion effective de bois illégal est difficile à établir. Entre 5 à 15 % du bois importé dans l'Union européenne serait concerné selon le ministère de l'Agriculture, 15 à 30 % selon Greenpeace. Pour la France, les estimations les plus restrictives, parues dans "Applied Agricultural and Forestry Research", tablent sur 2 à 6 % de bois illégal en 2009.
Le bois illégal ne provient pas uniquement de zones tropicales, mais il pose des problèmes particulièrement aigus en Afrique. "Dans des pays comme la République démocratique du Congo, il rime avec déforestation et violents conflits sociaux. C'est aussi un facteur majeur du dérèglement climatique", dénonce Frédéric Amiel, chargé de campagne Forêts chez Greenpeace. Or, "l'Afrique reste le principal exportateur de bois tropicaux" vers la France, selon le ministère de l'Agriculture. Le bassin du Congo (Congo, RDC, Gabon...) est une source d'essences rares comme le wengué, le sapelli ou l'iroko. Des bois très durs et imperméables, utilisés pour l'ameublement d'extérieur, les parquets et la marqueterie. "70 à 90 % du bois qui sort" de ces forêts est illégal, assure Frédéric Amiel.
Pourtant, l'importation de bois tropicaux est en "fort déclin" depuis deux ans avec "une baisse de 20 % chaque année", souligne Éric Boilley, le directeur du Commerce du bois, association regroupant importateurs, agents commerciaux et négociants. Quelque 2 % des grumes consommées en France en 2012 étaient d'origine tropicale et 12 % du bois de sciage, selon lui. En cause, les pressions écologistes, mais aussi des raisons "structurelles", explique Éric Boilley. Le marché de la menuiserie a reculé sous l'effet de la crise, et les bois tropicaux, très chers, deviennent moins compétitifs que les bois européens et des matériaux comme le PVC.

Lots suspects dans les ports

Mais les ONG continuent de repérer des lots suspects dans les ports de Caen, La Rochelle et Nantes, notamment. "Je ne vois pas de diminution de ce flux de commerce", assure Alexandra Pardal, qui a soumis des plaintes contre "quatre ou cinq sociétés" depuis mars. Pour alerter les députés, Greenpeace a brièvement saisi la semaine dernière une grume sur le port de Caen, dénonçant une importation frauduleuse de RDC. Consciente du problème, l'association Commerce du bois oblige depuis 2011 ses membres à adhérer à une charte fixant des procédures très strictes. "Nous avons perdu quelques adhérents qui n'ont pas voulu y souscrire mais pas des grosses entreprises", promet Éric Boilley. Autre raison d'agir: les fraudeurs "peuvent remporter des marchés" en proposant du bois de "5 à 15 %" moins cher, notamment parce que la marchandise n'a pas été taxée, selon Éric Boilley. "Nous sommes demandeurs de sanctions car cela risque de pourrir le marché", ajoute-t-il. Si le texte est adopté définitivement après son parcours parlementaire, l'importation de bois illégal pourra coûter jusqu'à deux ans de prison et 100.000 euros d'amende. Les contrôles ne se feront pas aux frontières, mais uniquement aux sièges des entreprises, pour vérifier qu'elles respectent la procédure. Un système qui "permet déjà d'éliminer nombre de fraudes", selon le ministère de l'Agriculture. "Il n'y a pas d'entreprises qui importent volontairement du bois illégal mais elles ne sont pas forcément très regardantes", d'autant que la filière compte "beaucoup d'intermédiaires", s'inquiète Frédéric Amiel, qui demande un durcissement du texte.

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