Le torchon brûle à l'aéroport de Bâle-Mulhouse

Un acte "unilatéral" et "inamical" : la décision de soumettre prochainement aux taxes françaises tous les vols au départ de l'aéroport franco-suisse de Bâle-Mulhouse suscite l'incompréhension en Alsace et surtout en Suisse, où les autorités vont jusqu'à évoquer des mesures de rétorsion.Le document qui a mis le feu aux poudres est une lettre adressée le 28 mai par la Direction générale de l'aviation civile française (DGAC) aux compagnies aériennes opérant dans la zone douanière suisse de cette plate-forme binationale, mais située entièrement sur le territoire français. La DGAC informait ces compagnies - qui gèrent 90 % des vols de l'aéroport - qu'elle seront soumises, à compter du 1er juillet, à deux taxes dont elles n'avaient jusqu'à présent jamais dû s'acquitter : la "taxe de l'aviation civile" (4,31 euros par passager pour les court-courriers, 7,75 euros pour les longues distances) ainsi que la taxe de solidarité sur les billets d'avion, dite "taxe Chirac" (de 1 à 4 euros par passager en classe économique, de 10 à 40 euros en première classe ou en classe affaires).
Une telle annonce est "inacceptable", s'est emporté le ministère helvétique des Affaires étrangères, car elle "contredit" une convention bilatérale de 1949 dotant l'aéroport d'un statut juridique spécifique. Les responsables suisses et alsaciens se perdent en conjectures sur les raisons de cette décision française. "La France a besoin d'argent", raille le ministre de l'Économie du canton de Bâle-Ville, Christoph Brutschin. La DGAC, de son côté, "n'a fait qu'appliquer des règles de droit français sur le territoire français", a dit Éric Héraud, son porte-parole. La décision a été prise par le directeur général de l'aviation civile, a-t-il précisé.
Le canton de Bâle-Ville, fustigeant un "acte unilatéral et inamical", a menacé de revenir sur les 10 millions de francs suisses (8 millions d'euros, sur 220 millions au total) qu'il avait promis pour aider à financer le raccordement direct de l'aéroport de Bâle au réseau ferroviaire d'ici 2020. "Tant que nous n'avons pas de solution, je considère que notre participation à ce projet est suspendue", a asséné Christoph Brutschin. En Alsace, les autorités locales ont également fait part de leur amertume. Le président de la région, Philippe Richert, s'est indigné que ni les élus locaux "ni même les préfets" n'aient été informés de la décision au préalable. Et le conseil général du Haut-Rhin a adopté à l'unanimité une motion dénonçant une initiative "soudaine et unilatérale", qui risque de "provoquer le départ de certaines compagnies" et en conséquence "fragilise grandement" l'aéroport et ses quelque 6.000 emplois.
Avec 5,35 millions de passagers transportés l'an dernier, l'EuroAirport est le cinquième aéroport de province et le troisième de Suisse. Les nouvelles taxes pourraient coûter 14 millions d'euros aux compagnies concernées, selon les calculs de la direction de la plate-forme. Premier impacté par les nouvelles taxes, le transporteur britannique EasyJet, qui génère à lui seul plus de la moitié du trafic à Bâle-Mulhouse, a fait savoir qu'il s'y opposait "fermement", d'autant qu'il n'a été prévenu qu'un mois à l'avance et n'aura donc pas le temps de répercuter la taxe sur des billets vendus des mois à l'avance. "Les consommateurs devront payer plus cher", avertit la compagnie à bas coûts. Avec des vols vendus parfois 30 euros pour un aller simple, la nouvelle réglementation entraînerait une hausse de prix de 20 % et ferait courir à l'aéroport "le risque de perdre des centaines de milliers de passagers", selon EasyJet. L'EuroAirport de Bâle-Mulhouse a déjà été au cœur de polémiques quant à la législation qui devait lui être appliquée. À la suite d'un arrêt de la Cour de cassation en 2010, qui prévoyait d'imposer le droit social français à toutes les entreprises - y compris suisses - opérant sur la plate-forme, certaines d'entre elles avaient menacé de partir. En mars 2012, les deux gouvernements avaient finalement scellé un accord pour que les sociétés concernées puissent continuer à appliquer le droit helvétique du travail.

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