Les ports marocains épargnés par le succès de Tanger Med

Si le Maroc s'est hissé Tanger Med au rang des pays qui réalisent de grands volumes en transbordement, la structure du trafic national est restée inchangée. En revanche, la crise sanitaire a pesé sur les ports historiques du pays. Explications de Mustapha El Khayat, président de l'Association marocaine de la logistique (Amlog).
Comment analysez-vous la montée en puissance du port de Tanger Med ?

Le succès de Tanger Med est le fruit d'une décision publique bien étudiée, mûrement réfléchie tant au niveau géographique qu'en matière de période. Tanger Med Special Agency (TMSA) lui a permis de connaître le progrès. C'est une institution qui n'est soumise à aucun contrôle classique ministériel. Cette autonomie, son partenariat créé avec des opérateurs maritimes manutentionnaires ainsi que le constructeur d'automobiles Renault lui a permis de connaître un essor rapide.

Quatorze ans après sa création, qu’est-ce que le hub de Tanger Med a changé pour les acteurs du transport et de la logistique au Maroc ?

La montée en puissance de Tanger Med a amélioré les connexions du Maroc avec les autres ports du monde. De plus, la zone de libre-échange, qui est un véritable théâtre pour les acteurs de la logistique internationale, profite également aux transporteurs et opérateurs marocains. En outre, dans le routier, les flux ont permis aux transporteurs marocains de développer leurs flottes et d'accroître leurs compétences. De plus, la facilitation du traitement des opérations a eu un impact positif sur la rapidité de transit portuaire au quotidien.

Sa position géographique stratégique sur le détroit de Gibraltar, sa fonction de hub, les concessions accordées aux opérateurs globaux des armateurs, son hinterland comme maillage industrialo-logistique multi flux offshore font sa spécificité. Le port possède trois terminaux conteneurisés, plusieurs postes pour ferries et navires ro-ro ainsi que des terminaux pour voitures et hydrocarbures.

La structure du trafic national préservée

Le volume de conteneurs en transbordement traité à Tanger Med a-t-il donné une nouvelle vocation au Maroc à l’international sur l’axe Est-Ouest et sur l’axe Nord-Sud avec l’Afrique subsaharienne ? Le hub a-t-il modifié la structure du trafic national dans le conteneur ?

Le trafic national marocain bénéficie de la progression des volumes en transbordement à Tanger Med. Il n'a pas remis en question l'activité des autres ports marocains. Pour le moment, le port de Casablanca conserve une part de marché largement supérieure en matière de trafic national. En revanche, trois éléments peuvent changer la donne pour les ports du pays : le développement de la numérisation, la facilitation des procédures et le niveau des taux de fret.

Trois concurrents méditerranéens actuels, deux de plus à terme

En quoi l'emplacement de Tanger Med est-il stratégique et quels concurrents peut-il redouter ?

Sa position géographique, à l'entrée et à la sortie du bassin méditerranéen, est stratégique. Tanger Med est également un hub pour l'intégration verticale Europe-Afrique. Ses concurrents actuels sont les ports d’Algésiras, Barcelone et Gioia Tauro. Ses concurrents potentiels à plus long terme sont Djen Djen en Algérie et Enfidha en Tunisie.

La présence de Tanger-Med dans le ro-ro a-t-elle remis en question les autres ports marocains les plus tournés vers cette technique ? Lesquels ont le plus souffert de ce nouvel équilibre au sein du Royaume ?

À l'origine, les autres ports marocains n’étaient présents dans le ro-ro qu’occasionnellement. De son côté, le port de Tanger a vocation à traiter du ro-ro et ro-pax. Il n'y a pas eu de d'incidence sur l'activité des autres ports nationaux.

Quelle place occupe le conteneur dans le commerce international marocain ? Est-ce que le ro-ro et le conventionnel sont-ils devenus quantité négligeable ou conservent-ils leur importance ?

Le conteneur est toujours privilégié pour les articles de grande consommation. En nombre d'EVP, il reste important mais en tonnage, je pense que le ro-ro et le conventionnel le dépassent largement.

Aucun paquebot depuis un an à Casablanca

La crise sanitaire qui a démarré en 2020 a dû peser lourd pour les acteurs de tous les modes de transport au Maroc. Le secteur du passager est celui qui a le plus souffert ?

Pour le port de Jorf Lasfar, la situation n’a pas connu de changement en matière de trafic et de revenu. À Casablanca, en revanche, aucun paquebot n'a opéré depuis un an.
Le trafic conteneurisé a diminué, le vrac a légèrement augmenté (céréales...). Le chiffre d’affaires a baissé d’environ 20 %.

Quels sont les ports et les professionnels du pays qui ont été en 2020 les mieux épargnés par la crise ou qui nourrissent le plus d’espoirs pour 2021 ?

Aucun port n’a été épargné. Les transporteurs routiers ont pu travailler pour répondre à la demande des produits de première nécessité.

Comment analysez-vous les performances réalisées par Tanger Med malgré la crise sanitaire ?

Un hub à vocation internationale reste plus flexible et mieux adaptable aux changements mondiaux imprévisibles. La bonne gouvernance et la maîtrise des risques pandémiques ont permis aux opérateurs ainsi qu'à l'autorité portuaire de s'adapter rapidement aux évolutions dues à la pandémie.

Quelles limites ou enjeux voyez-vous concernant l'avenir du hub marocain ?

À long terme, des bouleversements structurels de l'économie mondiale et marocaine prévisibles et imprévisibles nécessiteraient des innovations institutionnelles, organisationnelles pour pouvoir mieux s'adapter aux futures innovations qui toucheraient l'industrie automobile, les navires en escale et l'organisation portuaire.

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