Qualité de l'air : l'UE tousse mais bute sur ses propres normes

À l'Est, pollué par les centrales à charbon, comme à l'Ouest, où les gaz d'échappement asphyxient les métropoles, l'Union européenne peine depuis des années à faire appliquer les limitations qu'elle s'est elle-même fixée en matière de qualité de l'air - pourtant pas si sévères, diront certains.
La Pologne a récemment été condamnée par la Cour de justice de l'UE pour ses dépassements fréquents et persistants des seuils limites de pollution et ne pas avoir proposé de mesures pour y remédier au plus vite. La Bulgarie a subi le même sort en 2017.
Malgré une législation détaillée, les pays de l'UE ont encore du mal à contrôler leur air. Sur le bureau de la Commission : pas moins de 33 dossiers d'infraction à des stades plus ou moins avancés. Vingt-trois des 28 membres de l'UE sont concernés, et plus de 130 villes dans toute l'Union. La grande majorité des litiges est relative aux particules fines (PM10).
Face aux manquements répétés, l'exécutif européen a décidé jeudi 17 mai de renvoyer six États devant la justice de l'UE pour non-respect des limites d'émissions.
À Bruxelles même, capitale de l'Union, la station de mesure de la pollution, située dans la rue séparant la Commission européenne du Conseil, se retrouve au centre des attentions. L'artère est l'une des plus polluées de Bruxelles, selon l'ONG de juristes ClientEarth. Elle est au cœur d'une bataille juridique avec la région de Bruxelles, lancée par cette ONG et cinq habitants en septembre 2016, sur des stations de mesures de qualité de l'air qui n'ont pas fonctionné pendant des mois.

"Parmi les points noirs en France : la vallée de l'Arve"

Les litiges ne portent pas tant sur le dépassement des limites que sur les propositions des États pour y remédier, alors que la pollution atmosphérique provoque des centaines de milliers de morts par an. Le dioxyde d'azote (NO2), rejeté par les véhicules diesel, fléau des grandes villes, est responsable de 75.000 décès prématurés par an, selon les chiffres publiés en 2017 par l'Agence européenne de l'environnement (AEE). Mais le principal danger, ce sont les particules très fines (PM2,5), à l'origine d'un peu moins de 400.000 morts prématurées par an, ces particules composées de poussière, de fumée, de suie ou de pollen.
Dans le monde, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), un peu moins d'un tiers des décès du cancer du poumon sont liés à la pollution, un quart des accidents vasculaires, à peine moins pour les maladies du cœur. Longtemps, la qualité de l'air a été associée à la protection de l'environnement. "Désormais, nous faisons clairement le lien avec la santé", expliquait récemment la directrice de l'OMS, Maria Neira.
Un message adressé à l'opinion publique, peut-être moins sensibilisée dans les pays riches : "À Shanghai, Pékin, New Delhi, les gens le ressentent. Ici (en Europe), la pollution est peut-être plus invisible". Historiquement, la qualité de l'air s'est nettement améliorée dans l'UE, qui compte quelques "exemples de réussite", comme le recul spectaculaire des émissions d'oxydes de soufre, connues sous le nom de "pluies acides" (- 72 % depuis 2000).
"Les émissions diminuent en général mais pas au même rythme pour tous les polluants", relève Alberto Gonzalez Ortiz, expert pour l'AEE. Les émissions de particules très fines, si elles restent importantes, ont chuté d'un quart depuis le début du siècle.
Les capitales se mobilisent. La France table - à la faveur de son Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques - sur seulement trois stations de mesures dépassant les valeurs limites de NO2 en 2030 (contre 49 en 2010 et 10 en 2020). Parmi les "points noirs" en France : la vallée de l'Arve, près de Grenoble, où la concentration des activités (habitations, industrie, transport) et le relief de fond de vallée limitent la dispersion des substances nocives. Là encore, la population est exaspérée : début mai, 14 habitants ont saisi la justice administrative pour faire condamner l'État pour "carence fautive".
La France fait partie des six pays renvoyés jeudi devant la Cour de justice européenne, avec l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni, la Hongrie et la Roumanie.

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