Quelles infrastructures la France peut-elle se payer ?

Faut-il construire la ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse ou l'autoroute A45 entre Lyon et Saint-Étienne ? Et si oui, quand ? Une commission composée d'élus et d'experts doit proposer le 1er février une liste de chantiers à lancer, et trouver des sources de financement.
À peine élu président l'an dernier, Emmanuel Macron a annoncé "une pause" dans les grands projets de transports, tant qu'une loi d'orientation des mobilités ne serait pas adoptée. Cette loi est annoncée pour avril, et le gouvernement a pour l'éclairer créé le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), afin de faire le tri dans la masse de projets accumulés ces dernières années dans le pays et d'avancer un calendrier de réalisation. C'est cette commission présidée par l'ancien député socialiste Philippe Duron qui doit rendre ses conclusions à la ministre des Transports Élisabeth Borne. "On a monstrueusement suscité des espoirs par le passé en promettant des lignes à grande vitesse partout, sans plan de financement", pointe en particulier cette dernière.

Question de priorités

Or, les moyens sont limités et certains projets sont critiqués. La priorité est désormais, selon elle, à "l'entretien et la modernisation des réseaux existants", "l'amélioration des transports du quotidien" – ce qui implique également de s'attaquer à la congestion des nœuds ferroviaires – et au "désenclavement des territoires".
Le train ne pouvant pas aller partout, Élisabeth Borne veut aussi construire des routes. Il va donc falloir faire des choix entre tous les projets qui font débat depuis quelques années : on peut citer la ligne à grande vitesse entre Bordeaux, Toulouse et l'Espagne, les lignes nouvelles devant relier Paris à la Normandie et Marseille à Nice, Montpellier à Perpignan... Côté routier, on trouve une nouvelle autoroute entre Lyon et Saint-Etienne (l'A45), le désengorgement de Nancy-Metz-Luxembourg ou encore l'amélioration de la Route Centre Europe Atlantique (RCEA), un axe est-ouest particulièrement accidentogène.
Le Conseil d'orientation des infrastructures a consulté tous azimuts, et ses membres se sont beaucoup déplacés sur le terrain pour évaluer les besoins et discuter avec les habitants et les élus locaux. Pressé d'identifier pour chaque projet les financements nécessaires, il doit proposer trois scénarios.
Le premier est "tendanciel", recensant ce qu'il est possible de faire à budget constant. Le deuxième "prend en compte les objectifs de transports du quotidien et de rénovation des infrastructures" avec davantage de moyens, selon un participant. Le troisième, enfin, est plus volontariste, et beaucoup plus cher. Le gouvernement aura ensuite "à faire un choix parmi ces trois grands scénarios et à le traduire dans la loi de programmation et de financement des infrastructures qui sera présentée en avril", explique-t-on au ministère des Transports.
Puis le Parlement aura le dernier mot. De nombreux élus reviendront sans doute à la charge pour tenter de remettre "leur" projet au-dessus de la pile.

Trouver les financements

Pour dégager de nouveaux financements, le COI a déjà toute une boîte à idées, exposée dans un pré-rapport publié en décembre. Il suggère pêle-mêle une hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), le retour temporaire de la vignette automobile, la mise à péage de voies express ou de certains ouvrages d'art à refaire, la possibilité d'instaurer des péages urbains, l'adoption de taxes immobilières locales comme cela a été fait pour le métro du Grand Paris, et même la taxation "souhaitable" des livraisons à domicile...
Parmi les mobilités douces, le COI prend très au sérieux l'essor de la trottinette, remarquant que 58 % des gens qui ont un parcours domicile-travail de moins d'un kilomètre le font en voiture. Enfin, il risque de décevoir les inconditionnels du rail, suggérant de récupérer les emprises des voies ferrées très peu utilisées – et dont l'entretien coûte cher – pour y faire rouler des navettes autonomes.

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