
"L'affaire n'a pas été tranchée, elle a été mise en délibéré au 16 novembre prochain", a indiqué Me Philippe Brun, avocat du Comité d'entreprise (CE) de SeaFrance, à l'issue de l'audience. La compagnie qui assure la liaison transmanche Calais-Douvres emploie 880 salariés CDI et 200 CDD selon les saisons. Deux offres de reprise sont à l'étude, l'une associant Louis Dreyfus Armateurs (LDA) au groupe de ferries danois DFDS, l'autre étant un projet de Scop (Société coopérative et participative) présenté par la CFDT, syndicat majoritaire de l'entreprise.
L'audience du tribunal de commerce de Paris, où étaient examinées les offres de reprise pour SeaFrance, en redressement judiciaire depuis juin 2010, intervient après le rejet, lundi, par la Commission européenne du plan de restructuration proposé par le gouvernement français. Pour Bruxelles, cette solution n'était pas conforme aux règles européennes de la concurrence.
21 millions d'euros à trouver
"Nous avons présenté notre projet de Scop et le tribunal de commerce nous a donné un délai de trois jours pour répondre à deux questions techniques", a précisé Didier Cappelle, représentant de la CFDT, syndicat majoritaire de l'entreprise. "Le tribunal a été sensible à l'aspect social de l'affaire", et "on a le sentiment que c'est positif", a pour sa part estimé Éric Vercoutre, secrétaire (CFDT) du CE. "Maintenant, il va falloir que l'on trouve l'argent", a-t-il cependant reconnu, en précisant qu'il manquait encore quelque "21 millions d'euros". Pour Me Brun, "l'offre de la DFDS est irrecevable" parce qu'elle est "entachée" de "clauses suspensives qui ont été levées en cours d'audience", notamment sur le volet social, ce qui correspond à une modification de l'offre initiale, et est donc "illégal".
"Le tribunal a été sensible à l'aspect social de l'affaire"
"Nous ne sommes pas en compétition avec SeaFrance, nous défendons un projet qui peut sauver une grosse partie des emplois et créer un futur viable" pour la compagnie, a déclaré le PDG de DFDS, Niels Smedegaard. "Si la Scop peut trouver un financement, c'est très bien pour eux et nous les féliciterons mais, si cela n'est pas le cas, la seule alternative sera la liquidation judiciaire, et tout le monde perdra son emploi", a-t-il averti. "Nous pensons que nous avons une solution à offrir pour de nombreux employés et leur famille mais aussi pour les entreprises et les fournisseurs de la région de Calais", a assuré M. Smedegaard, estimant pouvoir "accroître l'activité de SeaFrance". "Une compagnie qui a perdu plus de 30 millions d'euros chaque année depuis plusieurs années ne peut pas continuer", a-t-il poursuivi en défendant son projet de reprise.
Aux abords du tribunal de commerce, des salariés de SeaFrance, venus de Calais, port de départ des ferries, ont manifesté leur colère, et leur soutien au projet de Scop (société coopérative dont les associés majoritaires sont les salariés). "On est là pour défendre la Scop, c'est la seule solution", a déclaré Cécile Jossien, déléguée CFDT, redoutant qu'un rachat se traduise par "un licenciement sur deux et des conditions de travail catastrophiques".