Sénat : la stratégie nationale portuaire "ne répond que partiellement aux attentes"

La commission sénatoriale à l'origine d'une proposition de loi sur la gouvernance et la compétitivité des ports juge sévèrement la stratégie nationale portuaire présentée par le gouvernement.
La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable au Sénat s'est réunie le 7 avril pour évoquer la stratégie nationale portuaire (SNP) après avoir auditionné le ministre délégué chargé des Transports, Jean-Baptiste Djebbari le 16 février. Ce point d'étape a fait l'objet d'un court rapport, jugeant les plans gouvernementaux près de trois mois après l'annonce du Premier ministre Jean Castex au CiMer du 22 janvier dernier.

Reconquête des parts de marché

Sans surprise, la commission sénatoriale à l'origine d'une proposition de loi relative à la gouvernance et à la performance des ports maritimes français se montre critique envers les annonces. Ce texte déposé par Michel Vaspart avait été adopté par le Sénat en décembre 2020. Il faisait suite à un rapport rédigé par l'élu des Côtes-d'Armor et présenté l'été précédent aux côtés de Martine Filleul, sénatrice du Nord et présidente de la mission d’information. 

Certes, les sénateurs saluent l'élaboration d'une stratégie nationale portuaire "qui fait écho à ses préconisations" en fixant "un objectif clair de reconquête de parts de marché à nos ports", à savoir atteindre "80 % pour le fret conteneurisé manutentionné à destination et en provenance de la France d’ici 2050". Ils se félicitent également de l'instauration d'un pilotage par la performance, à la fois au niveau portuaire avec les contrats d'objectifs et de performance, et national, grâce au comité dédié au suivi de la SNP. Des outils de pilotage, "comme l'a indiqué le ministre chargé des Transports, directement inspirés des propositions du Sénat".

Pas de planification à long terme

Mais la commission relève surtout ce qu'elle considère comme les carences de la SNP : "L'initiative du gouvernement ne répond que partiellement aux attentes de la commission : la trajectoire prévue est nettement en deçà des préconisations formulées, tant d'un point de vue temporel que financier (200 millions d'euros sont annoncés où la commission proposait 750 millions d'euros sur cinq ans)", déplore le rapport. Ainsi, la planification à dix ans est jugée "loin des dizaines d’années qui sous-tendent la stratégie portuaire chinoise" et des vingt ans préconisés par la proposition de loi".

Sur un autre sujet emblématique de leur projet de loi, les sénateurs considèrent que la SNP n'aborde pas la question de la gouvernance portuaire "de manière robuste". La commission a notamment proposé d'intégrer encore plus les acteurs économiques et les collectivités territoriales aux organes de direction, et de distinguer les ports d'Haropa et de Marseille des autres établissements : "Il s'agissait de promouvoir une gouvernance souple et adaptée à la taille des places portuaires", explique-t-elle. S'adressant au ministre, Martine Filleul avait déclaré en février : "Vous ne faites pas référence à la gouvernance, question pourtant essentielle pour que chacun se sente associé au renforcement de la compétitivité et au développement des ports".

"Le coût de passage portuaire n'est pas directement abordé"

Sur un plan opérationnel, la commission juge incomplète la réflexion sur la fluidité du passage portuaire, la SNP misant "avant tout sur les outils numériques" avec la mise en œuvre du "Dites-le nous une fois", d’un guichet unique maritime, ou l'expérimentation d’un point de contact unique aux frontières au Havre, à Dunkerque et Marseille. Elle déplore que la question du coût de passage portuaire "ne soit pas directement abordée".

Parmi, les "angles morts" relevés pas la commission sénatoriale figure aussi l'objectif de report modal, insuffisamment doté à son goût, alors qu'elle propose de donner la possibilité aux GPM "d’élaborer un plan de réduction des surcoûts de manutention fluviale". Son président, le sénateur du Doubs Jean-François Longeot, "(s)'interroge sur le réalisme de l'objectif avancé par le gouvernement d’augmenter de 30 % la part des modes de transport massifiés dans les acheminements portuaires. L’objectif me semble bon, mais quels sont les moyens ?".

Urgence face au Brexit

Les sénateurs déplorent d'autre part "l'absence de prise en compte des enjeux liés au dialogue social, pourtant incontournables à un moment où les ports sont rudement éprouvés par la crise économique". Enfin, le rapport reproche au gouvernement de louvoyer sur la question de l'attractivité des zones industrialo-portuaires. "Lors de son audition du 16 février 2021 devant la commission, Jean-Baptiste Djebbari a annoncé que la création de zones de relance économique portuaire temporaires était en cours d’étude", rappellent les sénateurs. Ces derniers réclament des zones franches douanières face au Brexit et aux velléités britanniques.

La commission rappelle enfin que les ports constituent un maillon essentiel de l’économie française qui mérite des ambitions élevées. Elle promet ainsi de suivre attentivement la mise en œuvre de la SNP et invite le gouvernement et l'Assemblée nationale à s’emparer de sa proposition de loi.

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