Les États membres de l'ONU s'accordent in extremis sur un traité de protection de la haute mer

Aux termes de la 5e session de négociations intergouvernementale qui s’est tenue au siège des Nations Unies, à New York, du 20 février au 4 mars, les États membres se sont enfin mis d’accord sur la protection d'un espace sous la juridiction d’aucun État. Le texte ouvre la voie à l’élaboration d’un cadre international juridiquement contraignant.

La précédente session, en août 2022, devait être la dernière, comme celle tenue en mars. Et toutes celles qui se sont enchâssées durant les quatre dernières années de négociations formelles. Alors que les pourparlers sont ouverts depuis plus de quinze ans – entamés en 2004 et formalisées en 2008 –, aucune séquence n’est parvenue à finaliser un texte contraignant visant à protéger la haute mer. Cette zone qui commence là où s'arrêtent les zones économiques exclusives (ZEE) des États, et qu’il est urgent de protéger car sous la juridiction d'aucun pays.

Lors de la session d’août, les différends portaient sur la définition des modalités de mise en place d’aires marines protégées et le partage des bénéfices monétaires issus des ressources marines. Le dernier projet de texte laissait ouverte la question de la redistribution initiale de 2 % – et à terme jusqu'à 8 % – des futures ventes de produits issus de ces ressources qui n'appartiennent à personne mais dont les industries pharmaceutiques, chimiques et cosmétiques espèrent tirer des molécules alors que les pays en développement n’ont pas les moyens de conduire de coûteuses recherches. Loin d’être subsidiaire, cette question est au cœur des clivages Nord-Sud.

Quant à la création des aires protégées, elle s’impose alors que seul 1 % de cet espace, qui ne concerne rien de moins que la moitié de la surface de la planète et plus de 60 % des océans, est protégé. A fortiori dans un contexte de crise climatique aiguë. Les mers sont un repaire de biodiversité, dont le rôle pour limiter le réchauffement climatique en absorbant une partie importante du CO2 émis par les activités humaines, est largement renseigné. Or, les océans s’affaiblissent, victimes des pollutions en tout genre et de la surpêche.

38 heures de négociations-marathon

À 3 h 30, heure de Paris, dans nuit du vendredi à samedi, à l’issue de deux nouvelles semaines de débats et de 38 heures de négociations-marathon, les délégués ont convenu d’un texte qui ne pourra être modifié qu’à la marge mais sans réouverture de fond, a insisté Rena Lee, la présidente de la conférence.

Lorsqu’il entrera en vigueur après avoir été formellement ratifié par suffisamment de pays, le traité permettra de créer de nouvelles zones protégées au sein desquelles la pêche, la navigation et les activités d’exploration telles que l’exploitation minière en haute mer seront strictement encadrées. Le texte oblige en outre les États à réaliser des études d’impact environnementales avant de projeter la moindre activité.

Quant à l’autre sujet sensible, le partage des bénéfices des ressources marines génétiques, si le principe du « partage juste et équitable des bénéfices de découvertes » a été acté, il faudra sans doute encore beaucoup d’échanges avant de parvenir à des règles strictes. Mais peu de détails ont été délivrés sur ce point. 

Pour renforcer la confiance Nord-Sud, l’Union européenne a promis 40 M€ pour faciliter la ratification du traité et sa mise en œuvre initiale.

Course contre la montre climatique

« La France n’a jamais lâché et en 2022 nous en avions fait une priorité diplomatique. C’est un accord historique pour la protection des océans, la préservation de la biodiversité marine et une avancée décisive dans la course contre la montre climatique », a réagi Hervé Berville, le secrétaire d’État chargé de la Mer, qui s’était rendu le 21 février à New York pour participer à « l’appel solennel à la communauté internationale à conclure ce traité majeur », lancé par l’activiste Jane Fonda, de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) et des ONG de la High Seas Alliance.

Dans un communiqué, ses services évoquent un accord qui fait suite à « l’adoption d’un accord lors de la COP15 Biodiversité visant à protéger 30 % des terres et des mers d’ici à 2030 ».

Paris est dans sa zone de confort. Le président Emmanuel Macron a fait du bruit ces derniers mois autour de la protection des océans et de la biodiversité marine. Il s’y est engagé à plusieurs reprises, lors du One Ocean Summit de Brest et lors de la conférence de Lisbonne pour les océans en 2022.

Lors de la COP 27 en Égypte, il s’est par ailleurs prononcé en faveur de l’interdiction totale de l’exploitation minière des grands fonds marins. « La France est à l’initiative de la Coalition de Haute Ambition pour les océans dite High Seas Alliance, qui regroupe désormais 51 membres et la France accueillera en 2025 la prochaine conférence des Nations unies sur les océans à Nice », rappelle le communiqué.

341 nouveaux engagements totalisant près de 20 Md$

Selon la ministre panaméenne des Affaires étrangères Janaina Tewaney, 341 nouveaux engagements, totalisant près de 20 Md$, ont été pris au cours de cette conférence de la dernière chance compte tenu du contexte critique pour la vie marine.

Adeline Descamps

 

 

 

 

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