Mol, NYK et K Line : l'intégration qui coûte cher

ONE les a plombés. Les résultats médiocres au cours de l'exercice clos 31 mars 2019 des trois transporteurs japonais sont directement imputés à la mise sur orbite du réseau. Les trois compagnies se montrent néanmoins optimistes quant à un retour sur investissement probant et visible dès l'exercice en cours. 

Les provisions sur résultats annoncées en mars dernier par l’un des trois armateurs japonais fusionnés sous la marque Ocean Network Express avaient sonné comme une alerte. Les marchés sont désormais fixés sur l'environnement commercial particulièrement dégradé de MOL, NYK et K Line, qui viennent de publier leurs résultats définitifs. Seul MOL s'en sort bien.

Le transporteur maritime le plus impliqué dans l’ensemble (avec 38 % des parts), Nippon Yusen Kabushiki Kaisha (NYK), a clôturé l'exercice 2018 (comptes arrêtées au 31 mars 2019) avec une perte nette de 44,5 milliards de yens (402 M$) alors qu’elle affichait un bénéfice de 20,2 milliards de yen (182,6 M$) un an auparavant. Le chiffre d'affaires a chuté de 16,2 %, passant de 2,2 à 1,8 milliards de yen. Plus marquant encore, le résultat d'exploitation s'est détérioré de 60,1 % (de 27,8 à 11 milliards de yen en un an, soit 99,4 M$).

« Nous prenons au sérieux les résultats de cette année. Nous avons mis en place les mesures nécessaires pour améliorer les résultats financiers et stabiliser nos activités (fret maritime et aérien, NDLR), ainsi que pour renforcer la gouvernance du groupe », a commenté NYK, qui a annoncé lors de la publication de ses résultats que Yasumi Kudo, l'actuel président du conseil d'administration de la société, occupera le poste de conseiller spécial tandis que lui succède à cette fonction Tadaaki Naito, jusqu’à présent président de NYK.

Pour ce qui est du maritime, la ligne régulière a été particulièrement affectée « en raison de coûts non récurrents plus élevés que prévu dus à des interruptions de service survenues immédiatement après le début des activités de ONE en avril 2018 ». Comme pour K Line, NYK a enregistré des pertes d'exploitation en raison de la résiliation de contrats de porte-conteneurs (des panamax) et vraquiers affrétés à One. Le transporteur doit absorber les réformes structurelles générées par l'intégration. Pour autant, NYK prévoit un bénéfice de 26 milliards de yens (233 M$) sur l'exercice fiscal se clôturant le 31 mars 2020. 

Même cause, mêmes effets

K Line subit le même sort. La compagnie (31 % des parts dans ONE) avait prévenu en mars en annonçant des provisions sur ses résultats d'un montant de 65 milliards de yens. Finalement, ses estimations se révèlent en deçà de la réalité. Frappée par l'annulation de contrats d'affrètement, la compagnie a enregistré une perte massive de 111,1 milliards de yens (1,03 Md$) pour l'exercice clos le 31 mars contre un bénéfice de 10,38 milliards de yens pour l'exercice précédent. Le chiffre d'affaires de l'exercice est tombé à 836,7 millions de yens contre 1,16 milliard de yens au 31 mars 2018.

K Line est aussi gagnée par l’optimisme pour son exercice en cours en dépit de l’exercice difficile. La compagnie japonaise, qui prévoit une augmentation de 4 % de l'offre et de la demande de transport à l'échelle mondiale, s'attend à un retour à la rentabilité dans le vrac sec, principalement dans le segment des capesize, grâce à des contrats à plus long terme. De même, elle cherche à stabiliser les bénéfices de ses activités de transport de vracs liquides par le biais de contrats à moyen et long terme (VLCC, transporteurs de GNL et de GPL). « Compte tenu de ces perspectives, nous prévoyons pour l'ensemble de l'exercice un chiffre d'affaires de 10,74 Md$ avec un bénéfice d'exploitation de 234 M$ ».

Mol s'en tire mieux

Alors que ses deux compatriotes luttent pour sortir du rouge, MOL a renoué au cours de l'exercice 2018 avec la rentabilité et ce, en dépit d'un chiffre d'affaires en baisse (autour de 11 Md$). Si bien que l’entreprise versera un dividende : « dans les années à venir, nous avons pour ligne directrice un ratio de distribution de 20 % liés à la performance de l'entreprise. Pour le prochain exercice, nous prévoyons de verser un dividende annuel de 65 yens par action ».

Sur le marché du vrac sec, le transporteur avait bien commencé le premier semestre de son exercice, bénéficiant de taux de fret élevés en raison des exportations de minerai de fer en provenance de l'Australie et du Brésil. Le déraillement d'un train de minerai de fer en Australie en novembre 2018 et la rupture du barrage minier au Brésil fin janvier 2019 ont complétement inversé la dynamique. Au cours du premier semestre de l'exercice, le marché du panamax a été soutenu par les volumes de charbon et de céréales en provenance d'Amérique du Sud. Puis l’entreprise a pâti notamment de l'atonie des expéditions de céréales en provenance d'Amérique du Nord en raison des frictions commerciales entre les États-Unis et la Chine et de de la restriction des importations de charbon par la Chine.

Pour l'exercice 2019, clos le 31 mars 2020, la société prévoit un bénéfice de 40 milliards de yens (361 M$), soit une augmentation de 48,8 % mais un chiffre d’affaires en repli 3,2 %. « Nous prévoyons que sur le marché des vraquiers Capesize, le taux se redressera au cours du second semestre mais l’incertitude persiste quant à l'impact réel de la rupture du barrage au Brésil. Les taux de fret pour les panamax et les petits vraquiers devraient rester fermes en raison des expéditions attendues de charbon et de céréales, dont la demande est en hausse », indique dans son rapport MOL.

La compagnie reste également confiante dans le marché des VLCC, estimant que la demande de transport de la production américaine (gaz de schiste) devrait prendre le relais des exportations par les pays de l’OPEP soumis à des restrictions de production dans un contexte troublé (sanctions américaines imposées au Venezuela, Iran mis au ban…). « En outre, l'introduction de la réglementation sur les émissions de SOx à partir de 2020 devrait stimuler le marché », indique l'entreprise, misant aussi sur la bonne gestion des capacités alors que le marché attend de nombreuses livraisons cette année (celles qui avaient été reportées l’an dernier pour apporter un certain soulagement à un marché structurellement excédentaire). Elle estime que la mise au rebut devrait également être stimulée par les réglementations sur le soufre et les eaux de ballast.

One, perte sèche

Reste l’ensemble fusionné : ONE a enregistré une perte nette de 96 M$ au quatrième trimestre se terminant le 31 mars 2019. Les trois compagnies du consortium font toutes valoir qu'elles retrouveront un niveau comparable à celui qu'elles avaient avant intégration. Au cours du second semestre, les taux d'utilisation des liaisons Asie-Amérique du Nord étaient plus élevés que prévu malgré une faible reprise des volumes après le Nouvel An chinois. « Bien que ONE ait de nouveau enregistré une perte au second semestre, ces facteurs, combinés à la stabilité des taux de fret Asie-Amérique du Nord et aux surcharges, ont contribué à rendre la perte plus faible que prévu », indique le réseau.

La fusion des trois plus grands armateurs nippons devait générer des synergies de coûts (premier objectif recherché par ce rapprochement) permettant de dégager quelque 440 M$ dès la première année. Elle se solde donc par un déficit deux fois supérieur aux bénéfices estimés, ne se sont pas privés de commenter les analystes financiers.

A.D. 

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