HMM, une stratégie à contre-courant ?

La stratégie expansionniste de Hyundai Merchant Marine, toujours soutenue par l'État coréen, pose question dans un contexte économique rendu chaotique par la pandémie de coronavirus.
Dans le contexte particulier du coronavirus, l'État coréen a accentué son soutien à Hyundai Merchant Marine (HMM), compagnie en difficultés depuis quelques années maintenant. Le dernier armateur national d'envergure est particulièrement soutenu par les pouvoirs publics depuis que ces derniers ont laissé disparaître leur fleuron, l'ex-numéro sept mondial Hanjin Shipping, à l'été 2016. Or, ses besoins ne font que s'accentuer avec la crise sanitaire et économique qui vient de débuter.

Des capacités quand la demande chute

Le 23 avril, HMM a reçu 720 milliards de wons (545 millions d'euros) de la part de deux organismes financiers d'État – Korea Development Bank (KDB) and Korea Ocean Business Corporation (KOBC) – en échange de bons convertibles. La première a ainsi augmenté sa part dans la compagnie de 34,8 % à 37 % et la seconde de 34,4 % à 36,6 %, soit 73,6% à elles deux.
KOBC a même financé à hauteur de 54 milliards de wons (41 M EUR) l'acquisition par HMM de 48.980 conteneurs dry, selon Alphaliner. "Cet investissement est censé soutenir le plan d'expansion agressif de la compagnie qui fera plus que doubler la capacité opérationnelle de sa flotte au cours des 15 prochains mois", commente le consultant.
Ce plan a commencé à se concrétiser avec la livraison fin avril du nouveau plus gros porte-conteneurs du monde, le "HMM Algeciras" (23.964 EVP), même si l'arrivée prévue pour cette année de onze autres mastodontes a été reportée. De plus, Hyundai a enregistré le retour de huit des neuf navires de 10.000 à 13.000 EVP qu'il avait affrété à Maersk et MSC pendant la durée de son partenariat avec l'alliance 2M. Le dernier doit revenir dans de courant du mois de mai.

2,8 md de pertes en quatre ans

L'armement est aujourd'hui à la tête de 474.186 EVP répartis sur 64 porte-conteneurs (dont 16 en propriété), ce qui en fait le neuvième opérateur de ligne maritime régulière au monde avec 2 % de parts de marché. Son carnet de commandes indique 382.744 EVP pour 19 unités, soit plus de 20.000 EVP par navire en moyenne.
Ces investissements d'envergure et cet afflux massif de capacité paraissent bien mal tomber en temps de crise économique majeure. "L'expansion de HMM coïncide avec la pire baisse de demande pour les compagnies maritimes", constate Alphaliner, qui s'attend à une diminution de 30 % en mai et à une fin d'année peu brillante. L'armateur "a fait perdre 3.700 milliards de wons (2,8 md EUR) à ses actionnaires depuis 2015 et la tendance doit se poursuivre en 2020".
Au contraire, la compagnie pourrait aussi bien récolter après la crise les fruits des efforts consentis par l'État aujourd'hui, si de la casse devait avoir lieu dans le secteur mais cette issue est très incertaine.

Des scrubbers quand le pétrole décroche

En attendant, un autre des choix de la compagnie, celui d'équiper massivement ses navires de scrubbers, semble contestable au regard de la conjoncture et pourrait lui coûter cher à court ou moyen terme.
Afin d'être en conformité avec les nouvelles normes d'émissions de soufre, HMM a prévu de doter de nettoyeurs de fumée plus de 70 % de ses navires, dont la totalité des 20 unités de 16.000 à 23.964 EVP à livrer d'ici 2021, alors que l'écart de prix entre le fuel à faible teneur en soufre (LSFO) et le fuel lourd (HFO) n'a jamais été aussi faible. La combinaison de la crise de la demande pétrolière due au Covid-19 et de la guerre des prix entre pays producteurs a ramené le LSFO à 144 dollars la tonne à Rotterdam et à 204 dollars à Singapour.
Jusqu'ici, 27 porte-conteneurs de HMM ont été équipés de scrubbers, d'après Alphaliner et d'autres "retrofits" sont prévus cette année. Le consultant estime à plus de 350 millions de dollars (325 M EUR) le coût total du programme, ce qui lui fait dire que le retour sur investissement de l'armateur est aujourd'hui significativement affecté, "l'écart entre LSFO et HFO étant tombé le 28 avril à 23 dollars la tonne à Rotterdam et 51 dollars la tonne à Singapour". C'est parfois en temps de crise que se préparent les plus belles réussites, mais beaucoup y laissent leur chemise.

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